jeudi 29 décembre 2011

J'aurais donc dû apporter mon Petit Robert 2012


Je me nomme à l’instant métalinguisticophile. J’aimerais vous partager mon véritable, authentique et passionné amour du langage. Base de la communication. Base de l’interaction. Base de la concrétisation de la pensée. Produit 100% humain. Ces temps-ci,  j’aime bien répliquer à ceux qui s’obstinent sur la vérité absolue que puisque le langage est un produit totalement fabriqué par l’être humain, tout ce qu’ils pourront dire ne sera jamais vérité. Et de toute façon, la vérité absolue rend malheureux. C’est la conclusion qui m’est venue lorsque dernièrement je remettais TOUT, mais absolument TOUT en question, et que je me demandais ce qu’il y avait après l’atteinte du but ultime. Nous partageons tous au moins une chose ou deux en commun : la vie, le monde. Nous sommes tous en vie (à moins que mes chroniques soient lues par des morts… si vous êtes concernés, veuillez essayer l’ère 2.0 et commentez ci-dessous.) Nous partageons tous la planète et l’univers (à moins que mes chroniques soient lues par des extra-terrestres qui en réclament la possession, voir dernière parenthèse.) Nous sommes tous humains  (à moins que… ah, vous savez!) Il n’est pas mauvais de se poser des questions, au contraire, (et je crois que le reste de mon blogue saura vous convaincre), nous devons brasser des idées et tenter d’en retirer quelque chose qui a du sens (et parfois c’est difficile, voir impossible.) Néanmoins, qu’on en sorte un sens ou un non-sens, il faut parfois arrêter  de questionner tout et vivre tout simplement. Préféreriez-vous regarder votre vie de haut, comme si vous n’y étiez pas? Eh bien,  je vous le confirme, vous y êtes. Oui, oui, vous êtes en vie. Vos pensées peuvent servir de plan pour organiser votre vie, mais votre vie elle, elle est concrète. Une œuvre ne peut pas être qu’un plan. Un festin ne peut pas être qu’une recette. Une pièce de musique ne peut pas être qu’une partition. Il manquerait une dimension. Qu’est-ce qui concrétise vos pensées? Qu’est-ce qui vous permet de partager ce qui bouillonne dans votre cerveau? Qu’est-ce qui fait la puissance, le charme, l’envoûtement, la dérision, la compassion, le rêve, la solidarité, la liberté? Le langage. Langage corporel, langage parlé, langage des signes, langage plastique, langage musical, langage codé, langage scientifique, langage, langage, langage, LANGAGE! Comme j’aime ce mot! Autant que communication. La plus petite parcelle du langage peut faire une énorme différence. Si vous vous croyiez seuls au monde, ne voudriez-vous pas qu’un être ne vous donne qu’un signe de vie, un petit mot, aussi simple qu’il soit, afin d’avoir encore espoir en l’interaction humaine? (Voir I Am Legend de Francis Lawrence pour un support cinématographique à l’appui.)

Pour cette petite madame âgée qui se sent abandonnée,
Pour ce chauffeur de taxi ou d’autobus qui en voit de toutes les couleurs,
Pour cette caissière qui en a plein le derrière de sa journée,
Pour le facteur qui se les gèle en trimbalant votre courrier,
Pour votre amie qui vit de durs moments,
Pour ce gars en running qui jogg sa vie laissant ses soucis dans ses traces de pas,
Pour ce petit enfant qui est impressionné par la grande aventure de la vie,
Pour ce gentil monsieur qui vient de vous laisse passer en voiture,
Pour ce douchebag ou cette bitch (pardonnez mon langage!) que vous avez aimé,
Pour ce prof qui vous a gardé éveillé tout au long de l’année (et même pour celui qui vous endort),
Un bonjour, un signe de la main, un sourire.
Si peu peut avoir une si grande conséquence.

On parle. On parle beaucoup. On écrit beaucoup. Discussions entre amis, small-talk de coin de rue, conversations téléphoniques, messages textes, réseaux sociaux, blogues, publications, service à la clientèle, commande d’une pizza. Le langage est certainement une des bases de la vie humaine.
Sans langage, il n’y a plus de bibliothèques, plus de littérature, plus de slams de poésie.
Sans langage, il n’y a plus de films, plus de chansons, plus de nouvelles.
Sans langage, il n’y a plus de laitier, plus de coiffeur, plus de voisins.
Sans langage, il n’y a plus de tradition orale, plus d’enseignement, plus de séduction.
Sans langage, il n’y a plus de mots, plus de signes, plus d’interaction.

C’est pourquoi je lève mon verre au langage. Je lève mon verre à tous ceux avec qui j’ai parlé,  à tous ceux avec qui je parle et à tous ceux avec qui je parlerai. Je lève mon verre à tout ce dont j’ai parlé, à tout ce dont je parle et à tout ce dont je parlerai. Je lève mon verre à un des plus beaux produits humains. Je lève mon verre aux mots, aux syntagmes, aux phrases, aux paragraphes, à la prose, aux rimes pauvres ou riches. Je lève mon verre aux fautes de syntaxe, aux lapsus, aux expressions sorties des boules à mites, aux accents prononcés. Je lève mon verre à l’alphabet phonétique, aux langues agglutinantes, synthétiques et analytiques. Je lève mon verre aux dictionnaires, aux journaux intimes, aux chansons cuculs, aux infopubs d’après-midi, au bégaiement, aux instructions d’Ikea. Je lève mon verre à TOI, qui lit ma chronique et qui participe au processus de communication, d’interaction, d’utilisation inconsciente du langage…

Alors, on s’appelle et on déjeune?


« Le langage est-il l’expression adéquate de toutes les réalités? » - Friedrich Nietzsche